Georges Paulin, Itinéraire d'un homme libre

Comment Georges Paulin, apprenti mécanicien-dentiste, est-il devenu styliste automobile avant d ’entrer en Résistance face à l ’occupant nazi et de mourir, fusillé, avec ses compagnons du réseau Alibi, au printemps 1942 ? C ’est à cette question que répond avec pudeur cette biographie qui se présente comme une réhabilitation de la mémoire de ces acteurs oubliés de la Résistance française.

Le récit s ’attarde donc sur la dernière année de Georges Paulin et de son ami Jacques Kellner, dernier représentant de la lignée des célèbres carrossiers. Au fil des pages, cependant, on revient petit à petit sur l ’enfance de Georges Paulin et de son frère Lucien-Vincent, sur les dures années d ’apprentissage, et sur les premières ébauches de ce projet fou esquissé dès 1926 d ’un capotage plus pratique à mettre en action que le dépliage manuel.

Et que Paulin finit par mettre au point, déposant, en 1931, le brevet d ’un procédé qu ’il baptise Eclipse. D ’abord expérimenté sur l ’Hotchkiss d ’un riche financier, M. Blum, qui lui propose de racheter son invention (mais Paulin refuse, préférant conserver son indépendance), avant d ’être finalement mise au point sur une 301 Peugeot dont son beau-père, M. Rouard, finance la transformation réalisée au sein des ateliers Marcel Pourtout.

Cette voiture est présentée dans la vitrine de la concession Peugeot d ’Emile Darl ’Mat, ce dernier se faisant le plus ardent défenseur de ce procédé auprès du constructeur sochalien. Peugeot finit donc par signer un contrat avec Paulin, ce dernier travaillant en parallèle avec Darl ’Mat pour dessiner un roadster sur châssis de 302 qui aboutira à la production, en petite série, de la 402 DS.

La carrière de styliste autodidacte de Paulin est malheureusement très courte, Peugeot ne renouvelant pas son contrat (le constructeur voulait réduire le montant des royalties). Pour assurer une indépendance financière suffisante, il ouvre donc un cabinet dentaire (entre-temps, il avait repris des études en ce sens). Mais sans jamais cesser de dessiner, puisqu ’on lui devra ainsi quelques magnifiques réalisations sur base Delage ou Talbot et la fameuse Bentley Corniche... Avant que la guerre n ’éclate et qu ’il ne choisisse délibérément le camp de la liberté à celui de la collaboration et de l ’oppression.

C ’était il y a 62 ans. Il était temps qu ’on lui rende hommage. C ’est chose faite, et avec brio, la grande histoire mêlant ses rugissements furieux à ces petites tranches de vies arrachées à la mémoire des rares survivants de cette période ou aux pages jaunies d ’archives enfin disponibles.